Apocalypse et Sahaj marg
Extraits de l’intervention de Roxana-Malina Chirilă lors de
la conférence de la FECRIS « Sectes apocalyptiques : utopies ratées et
conséquence pour les adeptes », à Perpignan, le 13 octobre 2012, in Bulles
N°118 (magazine de l’Unadfi).
« Une apocalypse
est une affaire émotionnelle. Je n’utilise pas ici le mot apocalypse dans son sens habituel de
catastrophe (disparition de l’homme, destruction de la civilisation, fin de
notre monde). Je parle du phénomène qui survient lorsqu’une secte intègre la
fin du monde à sa doctrine : on se prépare à une apocalypse très spécifique,
qui fait partie de la mentalité et du quotidien d’un groupe restreint de
personnes.
Cette apocalypse se
présente alors comme une réponse spécifique à des questions universelles :
reliée à la peur de la mort, traduite en une mort et une destruction à grande
échelle, elle peut, paradoxalement, donner à l’individu l’impression d’avoir un
meilleur contrôle de sa destinée personnelle.
Une apocalypse est un
jugement qui décidera une fois pour toutes qui sont les vertueux et qui sont
les pécheurs, qui avait la bonne foi et qui la mauvaise. Elle donne une chance
de combattre le mal et de se prouver que l’on est un sauveur, une personne
méritante ou un héros capable de faire face à n’importe quel défi.
Dans les sectes, les
apocalypses sont nombreuses et variées en fonction de l’enseignement spécifique
de chacune d’entre elles. Le cœur des divers scénarios de fin du monde reste
cependant le même et forme généralement un nœud d’émotions, de sens, de
concepts, de désirs et de peurs. A mon avis, pour commencer à désamorcer le
concept de l’apocalypse il ne suffit généralement pas d’apporter des preuves
contre la théorie de l’apocalypse chérie par le groupe. Il est également
nécessaire de comprendre comment les membres sont arrivés à croire à cette
apocalypse-là, et ce qu’elle implique pour chacun d’eux. (...) »
A la veille de l’an 2000, un journal français avait commis
l’erreur de croire que la SRCM était surveillée par les Renseignements généraux
en raison de son caractère apocalyptique. A l’époque, confondre ce mouvement de
méditation avec une secte apocalyptique était une erreur grossière.
Aujourd’hui, les choses sont beaucoup plus confuses…
Apocalypse ne signifie pas seulement fin du monde. L’apocalypse
c’est aussi un récit prophétique où la révélation divine est faite à l’homme. Révélation
d’une réalité spirituelle invisible et inaccessible à l'expérience courante
mais déterminante pour le destin humain. L’apocalypse sauvera le monde, elle
annonce l'imminence d'un monde spirituel nouveau alors que l'ancien monde
arrive à son terme. L’apocalypse est aussi marquée par le jugement dernier et
la colère de Dieu, une intervention divine qui juge les impies et les damnés
pour mieux récompenser les élus en leur proposant le salut. Après la
catastrophe vient le temps des survivants, de la reconstruction et de la
renaissance…
Comme la religion chrétienne a son apocalypse de Saint Jean,
la SRCM possède elle aussi son apocalypse depuis 8 ans, depuis le début de la
parution en 2005 des « Whispers from the Brighter world » rapportés
par une médium française anonyme et soi-disant dictés par Babuji.
Si les abhyasis étaient capables d’entreprendre le même
voyage spirituel que Kasturi Chaturvedi, la sainte du Sahaj marg, Chari
n’aurait jamais eu besoin de publier les whispers de l’apocalypse. Mais Chari
et ses précepteurs sont incapables d’offrir une expérience suffisante aux
abhyasis pour les retenir assez longtemps au sein de la Mission. D’où la
publication de ces révélations, murmures apocalyptiques quotidiens, en
provenance d’un autre monde plus lumineux…
Face à tant de problèmes et d’incertitudes dans nos sociétés,
face à une profonde insatisfaction vis-à-vis du monde actuel, l’apocalyptisme
répond à des besoins humains élémentaires. Croire connaître l’objectif
poursuivi, imaginer faire partie des élus qui peuvent être sauvés et referont
le monde a de quoi séduire les plus perdus et reléguer leurs sentiments d’impuissance
aux oubliettes.
A défaut d’adhérer au système de méditation de la SRCM, les
abhyasis veulent croire qu’ils participent à l’élaboration du futur et seront
les élus de l’avenir. Mais cela même est loin d’être un acquis leur annonce
Chari le 22 juillet dernier dans son discours « It all depends on You »
(Guru Purnima Day). Quand la Mission comptait 4 à 5 000 abhyasis, Babuji
lui aurait confié que seuls 2 ou 3 abhyasis l’accompagneraient dans le Monde
lumineux…
“(…) I said,
"Babuji, I know from my own little experience of Sahaj Marg that finally I
think you will be the only person to go to the brighter world" – from the
four or five thousand at that time who were abhyasis. He said, "Yes, it
looks like it. Maybe two or three more." You see, what he said? – himself
plus maybe two or three more! (…)”
Chari doit-il faire partie de ces 2 ou 3 personnes ? Rien
n’est moins sûr…
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